jeudi 25 février 2016

Le mur de l'eau, la négation du droit humain à l'eau (4)




Riccardo Petrella  
 animera le 11 mars à la médiathèque d’Orléans à partir de 20h30  une conférence débat: “Au nom de l’Humanité, l’audace militante."


Vous y êtes cordialement invité-e-s






LE  MUR  DE L’EAU
(4è partie)
La négation du droit humain à l'eau
               
Document de recherche de l’IERPE
Rédigé par Riccardo Petrella
Novembre 2015




3. Une proposition
       
       Le mur doit et peut être abattu. Il ne s’agit pas d’une action dans le court terme car, pour émietter les matériaux sur lesquels il a été construit, il faut  faire tomber  une série d’éléments fondamentaux de l’architecture actuelle de la “maison européenne ». On peut, à mon avis, démolir graduellement le mur si une partie des représentants élus au Parlement européen, ensemble et avec le soutien d’élus nationaux, régionaux et locaux, organisait une véritable « guériglia constitutionnelle politique » pour sauver la démocratie européenne et re-constitutionnaliser la société des droits et des biens communs publics en Europe en partant notamment de l’eau.

Par « guériglia » on entend souligner l’importance que le monde des élus (au plan européen, des Etats membres, des régions dont les compétences primaires en matière d’eau sont de plus en plus menacées, et des communes dont la traditionnelle autonomie est en train de devenir un souvenir) intervienne quotidiennement pour modifier les nombreuses (“petites”) dispositions législatives de nature substantielle, organisationnelle et procédurale qui ont conduit à la construction du mur. Un mur cimenté, comme on l’a vu, surtout par un système monétaire et financier fondé sur une répartition des compétences et des pouvoirs de plus en plus inégalitaire, à l’avantage des sujets technocratiques et des intérêts des plus forts et au désavantage des sujets et des institutions publics..

Nous proposons la mise ne place d’un travail permanent et coordonnée de dénonciation et proposition de modification des dispositions existantes en matière d’eau, des semences, de l’agriculture paysanne et durable, sur les liens entre l’eau, l’industrie agro-chimique et pharmaceutique et les marchés de la santé. Il s’agirait de s’attaquer à l’inacceptable importance  acquise dans les processus décisionnels par de centaines de comités, agences, programmes vers lesquels l’UE a « délocalisé » des fonctions-clé d’analyse, d’ évaluation et de gestion, par exemple, dans le domaine de l’innovation technologique, de la transition  énergétiques, de la compétitivité, de la promotion des PME, des start up et des “smart cities” ; de la soi-dite lutte contre la pauvreté, des programmes  culturels …Des pans entiers des responsabilités de la Commission ont fait l’objet d’une mainmise directe  par l’armée des « stakeholders » (« les porteurs d’intérêt ») devenus les chouchous de nos classes dirigeantes La « démocratie des stakeholders » est la grande innovation politique dont sont fiers les constructeurs actuels de l’Europe à la dérive. (31) Le parlement européen est d’ailleurs une des principales victimes. Intervenir avec détermination, compétence et rigueur, par des actions communes aux différents niveaux territoriaux, permettrait certainement de réaliser des modifications importantes au plan formel, réglementaire et de substance qui pourraient ouvrir des brèches dans le mur et le reste de l’édifice.  Les mouvements citoyens pourraient collaborer en tant que “puits” de connaissances, d’expertises et d’expériences généralisables.  Ils seraient non pas au service émietté et moléculaire, comme à l’heure actuelle, d’un tel ou tel autre parlementaire et/ou groupe de parlementaires, mais d’interventions communes européennes « trans-territoriales ». 

Les lobbies des stakeholders économiques sont  puissants parce qu’ils forment des espèces de “syndicats” de compétences et de connaissances. Les mouvements citoyens ne peuvent pas apporter aux élus  un soutien efficace important  si les élus et eux-mêmes  restent branchés sur leurs propres arbres. Les changements structurels interviennent après de nombreuses années de révolte, de luttes, de modifications des lois, des procédures et des institutions. L'expérience historique nous dit que  si des élus entamaient la guériglia avec détermination et de manière coopérative, de centaines d'associations et des milliers de citoyens se lèveront et deviendront les jambes dont on a besoin. 

Tableau
Les dates clé de la construction du mur
Calendrier sommaire



Note
(31) La « démocratie des stakeholders » est ce que les groupes dominants appellent « la gouvernance ».  


 



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