Les terres
nourricières sont soumises à la double pression de l'activité humaine et du
changement climatique. Dégradation, désertification, insécurité alimentaire...
Le GIEC en appelle à une gestion durable des sols.
Le GIEC a officiellement
présenté le 8 août dernier son rapport spécial relatif au changement climatique
et aux terres émergées.
Cet examen, complet, porte
précisément sur le changement climatique, la désertification, la dégradation
des sols, la gestion durable des terres, la sécurité alimentaire et les flux de
gaz à effet de serre dans les écosystèmes terrestres. Nul doute que ce rapport
contribuera à nourrir les réflexions lors de la COP
25 de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques
(CCNUCC) qui aura lieu en décembre à Santiago, au Chili.
Hommes, terres et climat dans un monde
qui se réchauffe
L'activité
humaine affecte directement plus de 70 % de la surface terrestre libre de glace
de la planète. Et ce alors que la terre fournit la base principale des moyens
de subsistance humaine, y compris l'approvisionnement en nourriture, en eau
douce et en de multiples autres services des écosystèmes, ainsi que la
biodiversité.
Depuis la
période préindustrielle, la température de l'air à la surface de la terre a augmenté presque deux
fois plus que la température moyenne mondiale. Les changements climatiques, y compris l'augmentation de la
fréquence et de l'intensité des extrêmes, ont eu un impact négatif sur la
sécurité alimentaire et les écosystèmes terrestres et ont contribué à la
désertification et à la dégradation des terres dans de nombreuses régions.
Pour autant,
les terres doivent rester productives pour maintenir la sécurité alimentaire en
dépit de la croissance démographique et des effets néfastes du changement
climatique sur la végétation qui ne cessent de croître..
La marge de manœuvre
est donc limitée pour tirer intelligemment parti des terres émergées afin de
faire face.
Désertification, dégradations...
Le rapport
prévient : la dégradation des terres résulte d'une chaîne complexe de causes
rendant difficile la distinction claire entre les facteurs directs et
indirects. Il liste toutefois de manière précise 44 processus de dégradation des terres et leurs liens avec le changement
climatique.
Un sol dégradé
est moins productif, car il est plus difficilement cultivable et perd de sa
capacité à absorber le carbone. Et c'est un cercle vicieux puisque ce phénomène
exacerbe le changement climatique, lequel exacerbe encore la dégradation des
sols à de nombreux égards.
L’agriculture,
la foresterie et d’autres types d’utilisation des terres représentent 23% de
nos émissions de gaz à effet de serre. Parallèlement, les processus terrestres
naturels absorbent une quantité de CO2 équivalant presque au tiers des
émissions dues aux combustibles fossiles et à l’industrie.
Une gestion
durable des terres, y compris la gestion durable des forêts, pourrait prévenir
et réduire la dégradation des terres, maintenir la productivité des terres et
parfois inverser les effets néfastes du changement climatique sur la dégradation
des terres. Il faut entendre par "gestion durable des terres"
l'intendance et l'utilisation des ressources terrestres, y compris les sols,
l'eau, les animaux et les plantes, pour répondre aux besoins humains
changeants, tout en assurant le potentiel productif à long terme de ces ressources
et le maintien de leurs fonctions environnementales.
Parmi les
exemples d'options, on peut notamment citer l'agroécologie (y compris
l'agroforesterie), les pratiques agricoles et forestières de conservation, la
diversité des espèces végétales et forestières, les rotations appropriées des
cultures et des forêts, l'agriculture biologique, la lutte intégrée contre les
parasites, la conservation des pollinisateurs, la collecte des eaux de pluie,
la gestion des parcours et pâturages, les systèmes agricoles de précision.
Ajoutons à cela
qu'environ 500 millions de personnes vivent aujourd'hui dans des zones touchées
par la désertification. Or, éviter, réduire et inverser la désertification
permettrait d'améliorer la fertilité des sols, d'accroître le stockage du carbone
dans les sols et la biomasse, tout en favorisant la productivité agricole et la
sécurité alimentaire.
Prévenir la
désertification plutôt que de tenter de restaurer les terres dégradées reste
préférable, en raison des risques résiduels et des résultats inadaptés
potentiels.
Des impacts en matière de sécurité
alimentaire
Le rapport fait
également ressortir que le changement climatique a une incidence sur les quatre
piliers de la sécurité alimentaire : la disponibilité (rendement et
production), l’accès (prix et capacité d’obtenir de la nourriture),
l’utilisation (nutrition et possibilité de cuisiner) et la stabilité
(irrégularité de la disponibilité).
Des effets qui
seront nettement plus accentués dans les pays à faible revenu d’Afrique,
d’Asie, d’Amérique latine et des Caraïbes.
Pour les
auteurs du rapport, des options d'intervention dans l'ensemble du système
alimentaire, de la production à la consommation, y compris les pertes et les
déchets alimentaires, peuvent être déployées et mises à l'échelle pour
favoriser l'adaptation et l'atténuation.
Certains choix
alimentaires impactent moins les terres et la ressource en eau et causent moins
d’émissions de gaz à effet de serre que d’autres. "Les régimes
alimentaires équilibrés riches en aliments d’origine végétale tels que les
céréales secondaires, les légumineuses, les fruits et les légumes, et les
aliments d’origine animale produits de façon durable dans des systèmes à
faibles émissions de gaz à effet de serre offrent de bonnes possibilités
d’adaptation aux changements climatiques et de limitation de ces
changements", selon Debra Roberts, coprésidente du Groupe de travail II du
GIEC.
Il pourrait
également être envisagé une diversification des cultures afin d'être plus
résilient face aux variations climatiques.
Quelles politiques ?
Le GIEC livre
plusieurs clefs au niveau des politiques à mener.
Une
mobilisation générale pour la durabilité, associée à des mesures immédiates,
offrirait les meilleures chances de faire face au changement climatique. Parmi
les conditions à remplir : une faible croissance démographique, une réduction
des inégalités, une meilleure nutrition et une diminution du gaspillage
alimentaire.
Des politiques
climatiques et foncières qui se soutiennent mutuellement auraient le potentiel
d'économiser les ressources, d'amplifier la résilience sociale, de soutenir la
restauration écologique et de favoriser l'engagement et la collaboration entre
de multiples intervenants
Les politiques
s'appliquant à l'ensemble du système alimentaire, y compris celles qui
réduisent les pertes et les déchets alimentaires et influencent les choix
alimentaires, permettraient une gestion plus durable de l'utilisation des sols,
une sécurité alimentaire accrue et des trajectoires à faibles émissions.
L'efficacité de
la prise de décision et de la gouvernance serait renforcée par la participation
des parties prenantes locales (en particulier celles qui sont les plus
vulnérables au changement climatique, notamment les populations autochtones et
les communautés locales, les femmes, les pauvres et les marginalisés) au choix,
à l'évaluation, à la mise en œuvre et au suivi des instruments politiques
d'adaptation au changement climatique.
► Le Résumé à
l’intention des décideurs, une fiche d’information et tous les documents se
rapportant au rapport (en anglais) se trouvent sur une page dédiée du site du GIEC (IPCC).
Camille Vinit, Code permanent
Environnement et nuisances
Source URL: https://environnement.actuel-hse.fr/content/limportance-des-sols-dans-la-lutte-cntre-
le-changement-climatique-0
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